
Oswald Wirth est né à Brienz, en Suisse alémanique, de parents Français. Son père, Edouard, artiste peintre Alsacien, avait été incarcéré neuf mois à Paris pour avoir participé en 1848 à la tentative avortée d’instaurer une “République Sociale”. Pour échapper à la surveillance policière, il dut se réfugier en Suisse avec sa famille.
Pourquoi la Suisse ? Probablement pour deux raisons. La première, c’est que la région de Brienz ressemble aux environs de Colmar d’où venaient les Wirth, et que l’on y parle un dialecte allemand proche de l’alsacien. La seconde, c’est que dans cette région touristique s’était développé un artisanat en bois auquel le peintre Edouard Wirth apporta une nouveauté : la couleur, qui fit la fortune de la petite commune. Quant à Oswald, il y vécut une enfance paisible, entre un frère aîné et une sœur de quinze ans sa cadette, un père agnostique qui le destinait à la peinture et une mère catholique, faisant tous deux preuve de tolérance. Peu motivé par les études, Oswald fut envoyé poursuivre sa scolarité à Fribourg chez les Bénédictins. C’est là qu’il découvrit par hasard, dans la bibliothèque de l’établissement, un livre traitant du magnétisme médical. Il s’y exerça alors, semble-t’il avec succès.
Sa mère meurt en 1878. La famille rencontre aussi des difficultés financières, et Oswald part en 1879 à Londres y exercer le métier de comptable. Passant par Paris, il y découvre la Société magnétique de France, et s’y fait inscrire. Il obtint ainsi à Londres les coordonnées de plusieurs magnétiseurs, dont Joseph Silberman qui lui fera connaître la Franc-Maçonnerie. Il côtoya un temps les théosophes de la Société Théosophique d’Helena Blavatsky, et trouva chez Mazaros à la fois une sensibilité fouriériste propre à lui rappeler son père, et l’auteur d’un ouvrage de magnétisme qui le ramenait à ses treize ans. Mazaroz était aussi Franc-Maçon.
Né en Suisse, Oswald était Français et devait par conséquent faire son service militaire en France. Incorporé en 1882 au 16e régiment d’infanterie de Châlons-sur-Marne, c’est dans cette ville qu’il est fait Franc-Maçon en janvier 1884, à la loge “La Bienfaisance chalonnaise” du Grand Orient de France. Il y rencontre des frères férus d’ésotérisme, et se voit chargé en 1885 par sa loge de répondre au questionnement de son obédience sur les modifications susceptibles d’être apportées aux rituels pour les simplifier. Il se prononce clairement pour un maintien du symbolisme traditionnel dans un rapport que ses frères, étonnés par la qualité de ses arguments, décident de publier. Le voilà, jeune maçon, déjà distingué.

Remarqué pour ses talents de dessinateur, son attrait pour le magnétisme, ses positions arrêtées au sein de la Franc-Maçonnerie, il est contacté en janvier 1887 par Stanislas de Guaita, déjà réputé dans le monde ésotérique, dont il sera le secrétaire, et qui lui demandera d’user de ses talents pour réaliser un tarot “kabbalistique”. Ayant retrouvé son mentor à Paris, Wirth y rejoint en 1889 la loge “Travail et vrais amis fidèles” de la Grande Loge Symbolique Écossaise dont il fut maintes fois Vénérable. Cette loge rejoindra (probablement fin 1898) la Grande Loge de France.
Oswald Wirth fut aussi un des rares membres de la très select “Société des Philalèthes”, conçue sur le modèle de l’Académie Française pour recevoir les plus grands auteurs maçonniques du monde. Il y retrouvera Rudyard Kipling et Armand Bédarride. Il fut aussi l’auteur de nombreux ouvrages de formation initiatique destinés aux Franc-maçons, et le fondateur de la revue “Le Symbolisme”. Son parcours exemplaire explique et justifie l’importance que lui accordent encore aujourd’hui une grande partie des Maçons.
(Source principale : Oswald Wirth 1860-1943, rénovateur et mainteneur de la véritable Franc-Maçonnerie / Jean Baylot. — Paris : Dervy, 1975)